Et oui c’est l’automne et bientôt Winter is coming !
Après cet été très sec , qui a normalement été défavorable aux strongles digestifs, le retour à la normale des températures et les ( légères) précipitations de Septembre peuvent leur permettre de se remultiplier.
Leurs cycles de 3 semaines leur laisse largement le temps, jusqu’à début Novembre selon la météo , pour recontaminer les jeunes animaux .
Nonobstant ( celui qui trouve le film et l’acteur gagne une copro) la bronchite vermineuse , strongle respiratoire un peu à part, cet article va tenter d’exposer et expliquer un tant soit peu , les examens réalisables à cette époque de l’année sur les bovins.
Un diagnostic qualitatif ( le parasite est il présent ? ) est nécessaire, et un diagnostic quantitatif ( Oui mais combien sont ils ? ) permettent d’évaluer la charge parasitaire. Mais attention, tous les examens , de la coproscopie à la Densité Optique, doivent être corrélés à d’autres paramètres ( Note d’Etat Corporel , Gain Quotidien Moyen, Temps de Contact Effectif, Production ) pour être cohérents. Le seul résultat de la coproscopie ou un densité optique élevée ne sont pas suffisants pour conseiller un traitement vermifuge.
PARAMÈTRES A PRENDRE EN COMPTE
- Les performances
Sur un lot de génisses au pâturage depuis Mars , que je fasse une coprologie en Mai , En Juin ou en Septembre, si les résultats sont relativement élevés , dois je systématiquement traiter ?
Et bien non .
Si mes génisses sont en bel état ( Note d’Etat Corporel satisfaisant ( 3/3.5 ) , Arrière train propre, bouses normales) , qu’elles ont atteint leurs objectif de croissance ( Gain Quotidien Moyen vérifié à la pesée hebdomadaire), la vermifugation ne paraît pas indispensable.
Pour être sûr de son coup , on fera un dosage de pepsinogène 4 à 6 semaines plus tard , car une coproscopie à partir de Novembre sera inutile. Les larves sont en hypobiose ( hibernation ) dans le tube digestif , bien au chaud, et ne pondent pas ou très peu. La coproscopie ne sera pas très significative.

- L état général
On est dans la même démarche que les performances mais avec juste du bon sens.
Ce lot là semble un peu maigre avec un poil terne , voir décoloré , hirsute à certains endroits.
On peut suspecter du parasitisme, même si l’aspect du poil n’est pas un critère de traitement . Une carence en oligo éléments ( particulièrement le Cuivre et le Zinc mais également le Cobalt et le Manganèse) ou en vitamine A peut décolorer le poil ou le rendre terne . Un problème pulmonaire ( autre que parasitaire) peut également rendre le poil hirsute et terne- En médecine chinoise la peau, donc le poil est reliée au poumon.
- Le Temps de Contact Effectif
Kesako ? Et comment le calcule t’on ?
C’est le temps de contact des animaux , plutôt de première année de pâture, mais on s’en sert aussi sur les vaches adultes avec la Densité Optique , des animaux avec les formes infestantes ( Larves au stade 3 ) des strongles digestifs.
Pourquoi ce paramètre ?
Plus le temps de contact effectif ( TCE ) est long , plus les jeunes animaux présenteront une immunité forte vis-à-vis des strongles l’année suivante.
On estime que la « résistance immunitaire » est acquise au bout de 6 mois de TCE , sans interruption !
Et c’est pour cela que sur le terrain on estime que pour qu’un TCE soit efficace immunitairement parlant , on prend plutôt 8 mois de présence en pâture.
Pourquoi cela ?
Car de ces 8 mois il faut déduire les périodes sèches ( 4 à 8 semaines selon les années ) durant lesquelles les parasites résistent peu et sont peu actifs-Ils aiment le chaud humide mais détestent le sec !
Il faut aussi déduire de cette période de TCE les traitements vermifuges. Si on est sur un non rémanent , on déduira quelques jours. Si on est sur une avermectine longue action , cela variera de 2 à 12 semaines !! – Pas la même chose. Les longues actions sont donc à proscrire , tant pour le TCE que pour l’apparition des résistances et la faune coprophage.
Avec toutes ces soustractions , les 6 mois de TCE effectif ne sont pas faciles à atteindre !! -Voir figure 1
Ce TCE servira aussi à l’interprétation de la Densité Optique. Pas d’interprétation de la DO ou de décision de traitement juste sur celle-ci , se serait une erreur ! On en reparle plus bas.
FAUT IL MAXIMISER LE TEC A TOUT PRIX ?
Non, surtout pas au détriment de la croissance des jeunes !
On surveillera donc ceux-ci comme le lait sur le feu ( ben oui surtout les génisses c’est elles qui feront le lait plus tard ! )
Comment ?
- Pesée mensuelle avec surveillance étroite des GMQ – On le rappellera jamais assez , le premier signe de parasitisme est une baisse d’ingestion , imperceptible à l’œil mais une baisse de GMQ , voir un arrêt sont à prendre en compte immédiatement pour en trouver les causes.
- Allotement par GMQ
- Traitement ciblé des moches et maigres ( vive les gros ! )
- Coproscopies ou dosages pepsinogènes de mélange réguliers : toutes les 6 /8 semaines selon la météo
Il faut maintenir une pression parasitaire pour que l’immunité s’installe durablement sans que les jeunes animaux en pâtissent. Tout un art !!

QUELS EXAMENS A L’AUTOMNE EN SYSTEME PÂTURANT ?
- LA COPROSCOPIE
Individuelle :
Sur les animaux en mauvais état , bien qu’il soit déjà beaucoup trop tard.
Pour savoir à qui on a affaire et comment l’on va traiter cet animal.
En mélange :
Il faut prendre au moins 10% des animaux du lot avec un minimum de 10 animaux. Si le lot est plus petit que 10 , on prend tout le monde.
Le mélange coûtera moins cher et permettra un screening du lot . Faire de l’individuel et ensuite faire une moyenne ? Mouais , pourquoi pas mais on arrive au même résultat en mélange.
La récolte peut être faite à terre , juste après que les animaux aient déféqué. On bloque le lot dans un coin de la parcelle, cela les stresse un peu et ils bousent systématiquement. On ramasse et c’est tout aussi efficace que les bouses récoltées au rectum. Cette méthode est utilisée avec le système FECPAK avec succès, en bovin comme en mouton , et les anglo-saxon ne sont pas connus pour faire les choses au hasard.
Cela évite quand même un gros travail de contention !
Limites :
Une coproscopie négative ne veut pas dire qu’il n’y a pas de parasites.
Ah zut ! Si on a un doute sur la présence de ces parasites , on en refait une 10 jours plus tard et s’il faut 10 jours plus tard encore.
A un coût d’environ 16/18 € HT (voir moins) l’investissement n’est pas énorme .
La coproscopie ne servira à rien à partir du moment où les températures descendent sous les 15° C . Une coproscopie fin Novembre pour chercher les strongles digestifs est très souvent inutile. Les larves, dans l’intestin, sont en hypobiose ( genre hibernation ) et ne pondent pas.
Sur les adultes, sauf troupeau carencé multiparasité immunodéprimé ( ça fait beaucoup quand même ) , les coproscopies seront souvent décevantes. Une vache adulte , bien immunisée , lorsqu’elle avale 2000 larves L3 infestantes en rejettera 1 dans ses bouses. Un animal de première année de pâture qui commence à s’immuniser lorsqu’il avale 2000 larves en rejettera 1500 dans ses bouses.
Comme souvent défini , la coproscopie est un outil certes imparfait , mais c’est actuellement un des plus facile à mettre en place et le moins onéreux.
Et bien sûr , on relie la coproscopie au GMQ, au NEC , au TEC , tout est lié avant de prendre une décision de traitement ou non .

Autre utilisation de la coproscopie
Elle servira à vérifier l’efficacité des traitements , en réalisant un Test de Reduction d’Excrétion Fécale ( TREF ) . Une coproscopie avant traitement et une coproscopie après ( sur le même lot et les mêmes animaux ) traitement – 10/12 jours après pour les benzimidazoles, le lévamisole et les traitements alternatifs, 14/16 jours pour les avermectines. On en parle pas des longues actions, à éviter !
Il faut en bovin atteindre un TREF de plus de 90% . C’est-à-dire que si votre coproscopie est à 1000 avant traitement , il faut qu’elle soit au maximum à 100 après traitement .
En dessous de 90% d’efficacité, on peut suspecter l’apparition d’une résistance des parasites, si tous les autres paramètres lors de la vermifugation ont été respectés ( Poids des animaux et dose adaptée entre autre).
Des études récentes ont montré l’apparition de résistances aux benzimidazoles et aux ivermectines chez les bovins, même en France !
- LE DOSAGE PESPINOGENE
Qu’est ce que ça mesure ?
Le pepsinogène sanguin . Mais que fait il là ?
Dans la caillette, l’estomac la plus acide des ruminants, la pepsinogène , activé en pepsine, sert à digérer les protéines.
Lorsque la caillette est abîmée par les parasites de type Ostertagia, le pepsinogène passe dans le sang , en quantité proportionnelle à l’étendue et à la gravité des lésions de la caillette.
On peut donc relier le niveau de pepsinogène sérique à la charge parasitaire en Ostertagia.
Mais les autres parasites me direz vous ?
Le cycle des strongles digestifs étant à peu près le même ( durée, conditions météorologiques ) on fait le « parallèle » entre l’infestation Ostertagia et les autres strongles digestifs.
On utilise pour le moment le dosage pepsinogène à l’automne, lors de la rentrée à l’étable , car l’Ostertagiose peut provoquer , durant l’hiver par réveil de larves ( accumulation de larves L4 enkystées dans la caillette) , des pertes d’état voir des diarrhées sévères chez les animaux suite à la première année de pâture.
Mais l’Ostertagia étant aussi présente le reste de l’année , on pourrait utiliser ce dosage durant la saison de pâture afin d’estimer la charge parasitaire.
Pas beaucoup plus cher qu’une coproscopie ( 15/20 € HT ) l’analyse de mélange est tout à fait possible.
Comment l’interpréter ?
Le dosage pepsinogène est donné en milliunités de Tyrosine ( mUTyr) , le truc qu’on croit qui n’existe pas mais qui n’existe ( Jamel DEBOUZE dans ? Une copro à gagner )
Entre 500 et 900 les valeurs sont normales.
Autour de 1000-1200 on estime que la charge parasitaire est faible.
Autour de 1500-2000 , la charge parasitaire est élevée.
D’après le Dr CAMUSET ( Formation parasitisme SNVGT ) , on retient le seuil de 1750 mUTyr comme seuil déclencheur de traitement antiparasitaire, ou non encore une fois !
Voir tableau 2
Comme le dosage est souvent fait à l’automne , on pense qu’un tel résultat signifie une charge en Ostertagia importante qui pourrait provoquer des pertes d’état et des diarrhées en hiver.
Encore une fois , le dosage de pepsinogène sera corrélé avec l’état des animaux au moment du résultat, les GMQ, les antiparasitaires reçu , la gestion du pâturage.
Contre l’ostertagiose et les parasites présents à l’automne , un vermifuge type benzimidazole ou lévamisole suffit souvent largement et c’est beaucoup moins cher !
Limites :
- Pas de dosage chez les adultes. Il n’existe pas encore de seuil d’interprétation fiable chez les bovins adultes
- Des ulcères de la caillette pourraient aussi faire augmenter le pepsinogène sérique .

- LA DENSITE OPTIQUE
La Densité Optique ( ou plutôt Ratio de Densité Optique ) mesure le niveau d’anticorps ( Immunoglobuline qui se lie à « l’agresseur » , plus elle est présente , plus l’agresseur est passé par là) dans le lait , anticorps Ostertagia .
Là encore on ne mesure que le niveau d’anticorps Ostertagia mais on peut corréler cette DO avec le niveau d’infestation par les strongles chez les vaches laitières, et là on dose sur le tank donc le troupeau .
La DO est réalisée en fin de saison sur le lait de tank . Ce qui doit donner une indication de l’exposition des vaches laitières au parasite Ostertagia. Plus la DO est élevée , plus l’exposition au parasite ( et au parasites ) a été importante.
Sauf que, ben oui ce serait trop simple sinon , il ne faut JAMAIS interpréter la DO seule , puisqu’elle est dépendante du TCE ( Temps de Contact Effectif ) vu plus haut !-Voir Tableau 3
Pour le moment , tout le monde s’accorde à dire qu’il faut interpréter la DO avec une grande prudence. Des tableaux existent qui mettent en relation la DO et le TCE ( voir ci-dessous ) .
Limites :
- On obtient avec la DO un niveau d’exposition par le dosage anticorps des vaches adultes à Ostertagia . Mais cela ne reflète pas le nombre de parasites dans led animaux. De plus le taux d’anticorps anti Ostertagia peut persister assez longtemps ( plusieurs semaines ) dans le sang . On a donc pas une image de l’infestation au temps T mais un reflet de l’exposition aux parasites
- Comme indiqué plus haut et il faut le répéter, la DO ne peut ABSOLUMENT pas être interprété seule. Il faut la corréler ( voir tableau ) au TCE. Si on ne se base que sur la DO pour traiter on a 40% de chance de traiter inutilement ( Source CASDAR parasitisme) ! Donc pas de systématique !

Et oui comme vous le constater sur le tableau , DO élevée mais TCE long, aucune utilité de traiter !
CONCLUSION
On fait quoi alors ?
Et bien on se sert de tout ça pour maîtriser la parasitologie sur l’élevage .
Cela a un coût certes, mais bien utilisé et bien conseillé , on fait des économies :
- De vermifuge surtout , qui peuvent être assez onéreux
- De gain de croissance ou d’absence de retard de croissance
- De reproduction car les génisses arrivent à l’insémination au bon moment et en état , donc la réussite est optimale !
Il faut donc :
- Peser les jeunes très régulièrement ( 4 à 6 semaines ) avec du matériel adapté et qui encore mieux, permet d’enregistrer les poids.
- Réaliser des coproscopies de mélange en début d’automne pour voir où on en est .
- Réaliser une coproscopie de contrôle si un traitement est effectué en début d’automne pour vérifier que le TREF est supérieur ou égal à 90% ( et ceci est valable pour les traitements tout au long de l’année ).
- Réaliser un dosage de pespinogène de mélange en fin d’automne ( fin Novembre , début Décembre ) pour estimer le niveau d’infestation parasitaire des premières années de pâture.
- Et on reliera tout ça au TCE ( Temps de Contact Effectif et n’oubliez pas les soustractions ! ) , au NEC ( Note d’Etat Corporel ) , aux courbes de croissance, à la gestion du pâturage ( jamais plus de 3 jours ) , et à la météo , la chose la plus importante !
Il faut anticiper ( la météo et les températures ) , surveiller , développer l’immunité sans l’inhiber, traiter sans surtraiter (ni sous traiter d’ailleurs) pour arriver à un équilibre parasite/troupeau qui évitera les catastrophes. Il ne faut rien laisser au hasard.
La gestion du parasitisme se fait donc, comme la gestion de l’herbe, avec un plan de gestion rigoureux qu’il faudra adapter tous les ans selon la météo de l’année. Facile sur le papier , moins évident sur le terrain mais une fois intégré dans la gestion de la ferme, les reflexes et les bonnes pratiques coulent de source.
Alors à vos bouses , prêts ! Gérer !